Tout d'abord il faut partir des faits. En juillet 2004 à Menville, il n'était pas que 9, mais plusieurs centaines... 222 faucheurs volontaires se sont même portés solidaires des faits incriminés et ont demandé à être jugés de même. Ce que la Justice (le parquet) a refusé, rejetant leurs aveux. Etonnant non ? Il me semblait que le rôle de la justice était de découvrir les coupables et de les sanctionner comme il se doit. 9 "délinquants" c'est socialement condamnable, 222 c'est plus compliqué de faire avaler la pilulle car on voit mieux que ce qui est condamné alors ce ne sont plus des individus mais des idées ; et pour maintenir l'illusion démocratique c'est gênant.

Il semble donc que ce ne soit pas le rôle de simple instrument du Droit que l'on veuille faire jouer à la justice dans cette affaire. Il ne s'agit pas tant de punir que de faire un exemple et ce faisant de clôre le débat sur les OGM par le rappel que la loi est la loi. Elle identifie à cet effet des têtes d'affiche du mouvement des faucheurs volontaires et les désigne à cet effet des "meneurs". Ceci inspire une autre réflexion sur ce que fait la Justice dans cette opération : en assimilant des élus du peuple comme on dit et des représentant syndicaux à des meneurs, elle commet d'emblée un dénie de démocratie. Les "porte-parole" sont niés comme tels et accusés d'imposer leurs représentations et d'induire les actions de "simples" citoyens qui serait irresponsables et "suiveurs". En distinguant par avance des "citoyens +" et des "citoyens -", la Justice ne dévoie-t-elle pas de manière éhontée la démocratie ?

En réalité ce qui dérange c'est bien que se constitue un mouvement citoyen qui revendique le droit à l'expression sur des sujets de société comme la culture des OGM et qui demande l'organisation d'un débat transparent sur le sujet. Comment s'étonner alors que les palais de Justice deviennent des lieux de débat public ? Et d'ailleurs faut-il s'en offusquer. Les avocats de la partie civile dénoncent ainsi ce "détournement" en rappelant à nouveau que "la loi est la loi" et que rien jamais ne saurait justifier la violence et la spoliation de la propriété privée. C'est oublier un peu vite que l'intérêt général doit toujours primer l'intérêt particulier (mais il est vrai que la pensée libérale aurait tendance à nier cette vérité sociologique première de l'organisation des sociétés). C'est oublier que le Droit n'est jamais l'expression d'une vérité transcendante, fut-elle celle du Dieu "Argent". Le Droit s'est forgé dans l'affrontement des intérêts socio-économiques, et il est ainsi des causes et des débats qui nécessitent que les citoyens puissent s'exprimer dans l'enceinte des palais de Justice, dès lors que les autres voies de l'expression sont refusés comme l'interdiction du reférendum d'initiative populaire sur les cultures d'OGM dans le département du Gers (Voir le billet - O G'aiMe la démocratie participative à la française

Pour en savoir plus : - OGM le procès de neuf faucheurs s'ouvre alors que le débat public monte - Les élus prévenus défilent à la barre